Le mal-logement en France
Plus de quatre millions de personnes sont considérées comme mal logées par la Fondation pour le Logement des Défavorisés. Près d’un million n’ont pas de domicile personnel, 100 000 vivent dans une habitation de fortune toute l’année.
Publié le 1er février 2025
https://www.inegalites.fr/Le-mal-logement-en-France - Reproduction interditeQuatre millions de personnes – soit 6 % de la population – sont considérées comme mal logées en France, selon le rapport 2025 de la Fondation pour le logement des défavorisés. Du sans domicile fixe au jeune contraint de revenir vivre chez ses parents, en passant par un couple qui vit avec son enfant dans un studio, ce chiffre rassemble des populations logées dans des conditions très différentes. Pour essayer de mieux comprendre cette réalité, nous avons regroupé trois formes principales de mal-logement : l’inconfort, le manque d’espace et l’absence de logement à soi.
La première forme de mal-logement est le fait de vivre dans un habitat dégradé : 2,2 millions de personnes sont concernées. D’abord, pas moins de 100 000 personnes vivent dans des habitats de fortune, des cabanes, dans des campings, etc. S’y ajoutent 208 000 gens du voyage qui ne disposent pas d’aire aménagée et vivent dans des conditions souvent particulièrement dures. On compte aussi 20 000 travailleurs immigrés hébergés dans des foyers vétustes en attente de rénovation. À ces très mal-logés s’ajoutent ceux qui disposent de leur propre logement mais pas du minimum de confort, soit 1,9 million de personnes. Ces logements n’ont pas d’eau courante, de douche, de WC intérieurs ou de coin cuisine, ou encore ont un moyen de chauffage défaillant ou une façade très dégradée.
La deuxième forme de mal-logement est le manque d’espace, situation qui concerne plus d’un million de personnes. Selon l’Insee, le peuplement normal d’un logement répond à la norme suivante : au moins une pièce pour le ménage (le séjour), plus une pour un couple (une chambre), plus une pour les célibataires de 19 ans ou plus, plus une pour deux enfants s’ils sont de même sexe ou ont moins de sept ans, sinon une chambre supplémentaire par enfant. Un logement qui ne répond pas à ce minimum est dit « surpeuplé ». Le surpeuplement est « accentué » s’il manque deux pièces ou plus par rapport à la norme de peuplement de l’Insee : c’est ce critère que nous utilisons.
Enfin, la troisième forme de mal-logement est de ne pas disposer de logement personnel : un million de personnes sont concernées. 350 000 personnes n’ont pas de domicile. Parmi elles, la majorité est logée de façon très précaire en centre d’hébergement d’urgence ou à l’hôtel. Une enquête réalisée en 2012 par l’Insee estimait le nombre de sans-abri (les « sans domicile fixe ») à plus de 10 000, mais le chiffre a sans doute augmenté depuis. Une partie de la population française continue à vivre dans des conditions particulièrement indignes. En plus, 25 000 personnes vivent en permanence à l’hôtel, souvent de très mauvaise qualité, sans cuisine. Enfin, 643 000 personnes sont hébergées chez des tiers. Elles ne vivent pas nécessairement dans des logements inconfortables, mais elles sont contraintes de vivre chez autrui.
Le mal-logement en France Unité : nombre de personnes | |
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1- Habitat dégradé | 2 202 000 |
Logements inconfortables | 1 874 000 |
Gens du voyage en mauvaises conditions d'habitat | 208 000 |
Habitat de fortune (camping, cabane, etc.) | 100 000 |
Foyers de travailleurs migrants dégradés | 20 000 |
2- Logements exigus (surpeuplement) | 1 128 000 |
3- Absence de logement personnel | 1 018 000 |
Hébergement contraint chez un tiers | 643 000 |
Sans domicile (sans-abri, hébergement d'urgence, etc.) | 350 000 |
Résidence permanente à l'hôtel | 25 000 |
4- Personnes comptées deux fois | - 175 000 |
Ensemble | 4 173 000 |
Source : rapport 2025 de la Fondation pour le logement des défavorisés d'après des sources et des années d'enquêtes différentes – © Observatoire des inégalités
Des données imparfaites
Ces données constituent des ordres de grandeur qui permettent de mesurer l’ampleur des difficultés, mais elles ont des limites. La distinction entre les formes de mal-logement est discutable car elles se combinent souvent. Les personnes sans domicile conjuguent le manque de logement et des conditions de confort le plus souvent extrêmement difficiles. Le caractère « inconfortable » d’un logement regroupe des situations très différentes, du bidonville à l’absence de cuisine. Ces chiffres sont tirés de plusieurs sources, avec des années différentes, principalement de 2013, il y a plus de dix ans. Par ailleurs, une partie des personnes qui n’ont pas de logement personnel (hébergées chez des tiers) le sont de façon temporaire et parfois dans de bonnes conditions. Il est discutable de les inclure dans le même ensemble que les sans domicile en centre d’hébergement ou à la rue.
En outre, une partie des sans-abri et des très mal-logés échappent aux statistiques, la dernière enquête de l’Insee sur le sujet datant de plus de dix ans. Les personnes qui vivent dans des hôpitaux, des maisons de retraite, des foyers de travailleurs (souvent dans une seule chambre) ou en prison ne sont pas comptabilisées. La norme de surpeuplement est établie en nombre de pièces et non en termes de superficie. Une personne seule vivant dans une minuscule pièce au rez-de-chaussée d’une route passante est considérée comme « bien logée ». Ces chiffres ne prennent pas en compte la pollution et le bruit.
Certes, la situation du logement en France n’a pas grand-chose à voir avec celle que notre pays a pu connaitre dans l’après-guerre. Mais la persistance d’un tel niveau de mal-logement est d’autant plus problématique que notre pays est parmi les plus riches au monde et que, justement, les conditions générales de logement se sont globalement améliorées sur le long terme. Enfin, il ne faut pas oublier qu’une partie de ce mal-logement résulte du choix de propriétaires qui mettent des logements en location, mais refusent de réaliser des travaux d’amélioration, dans le but d’en tirer des revenus plus élevés.
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