La pauvreté selon le sexe
Les taux de pauvreté féminin et masculin sont quasiment identiques. On considère en effet qu’au sein d’un couple, les revenus du ménage sont partagés à égalité. Pour comprendre la précarité d’une partie des femmes, il faut s’intéresser à leurs ressources individuelles.
Publié le 10 décembre 2024
https://www.inegalites.fr/La-pauvrete-selon-le-sexe - Reproduction interdite8,4 % des femmes sont pauvres contre 7,8 % des hommes, selon les données 2022 de l’Insee au seuil de pauvreté de 50 % du niveau de vie médian. La faiblesse de l’écart n’a rien d’étonnant. L’Insee mesure les revenus disponibles à l’échelle des ménages, non sur la base des revenus des femmes d’un côté, des hommes de l’autre. On considère que les membres d’un ménage partagent leurs ressources. Une femme sans revenus qui vit avec un cadre qui touche 5 000 euros par mois n’est pas considérée comme pauvre. Le fait que les femmes sont plus souvent au foyer ou à temps partiel, et que leurs rémunérations sont en moyenne plus faibles, appauvrit autant les femmes que leurs conjoints, puisque leurs revenus sont partagés pour l’institution statistique. En réalité, pour l’essentiel, cet écart vient des faibles niveaux de vie des familles monoparentales, essentiellement constituées de femmes seules avec enfant(s).
Pauvreté selon le sexe | |||
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Nombre de personnes pauvresen milliers | Taux de pauvretéen % | Part dans la population pauvreen % | |
Femmes | 2 728 | 8,4 | 53 |
Hommes | 2 402 | 7,8 | 47 |
Ensemble | 5 130 | 8,1 | 100 |
Source : Insee – Données 2022 – © Observatoire des inégalités
Pauvreté des ressources individuelles
Lorsque l’Insee s’intéresse – c’est très rare [1] – aux revenus individuels, l’institut prend en compte les revenus des femmes et des hommes séparément, plutôt que de considérer que les membres du couple partagent un même niveau de vie. Cela permet de comparer les revenus tirés du travail selon le sexe, avant le versement des prestations sociales (minima sociaux, allocations familiales, etc.), mais en incluant les indemnités chômage ou les pensions de retraite.
Revenus individuels du travail selon le sexe et l'activité | |||
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Femmes en euros | Hommes en euros | Écart femmes/hommes en % | |
Actifs | |||
Seuil des revenus les 10 % les plus bas | 323 | 479 | - 33 |
Seuil des revenus les 30 % les plus bas | 1 081 | 1 383 | - 22 |
Retraités | |||
Seuil des revenus les 10 % les plus bas | 396 | 884 | - 55 |
Seuil des revenus les 30 % les plus bas | 858 | 1 316 | -35 |
Source : Insee – Données 2015 – © Observatoire des inégalités
Ces données – datées de 2015 – montrent que les écarts entre les femmes et les hommes sont plus importants chez les pauvres et chez les riches qu’au milieu de l’échelle. Si l’on ne considère que les actifs, les femmes touchent un tiers de moins que les hommes aussi bien au sein du dixième le plus pauvre que chez les 5 % les plus riches. Tout en bas, l’écart résulte notamment du temps partiel et du développement de l’emploi féminin peu qualifié et, en haut, des écarts salariaux entre femmes et hommes qui s’accroissent quand on s’élève dans la hiérarchie des professions.
Chez les retraités, les écarts de revenus individuels entre les femmes et les hommes sont encore plus grands. Les 10 % des femmes aux pensions les plus modestes ont des revenus personnels extrêmement faibles, inférieurs à 400 euros par mois avant prestations sociales, soit 55 % de moins que les 10 % des hommes retraités aux revenus les plus bas. Près d’une femme retraitée sur trois touche personnellement moins de 858 euros par mois. Un peu moins de 10 % des hommes retraités sont dans ce cas. Cet écart reflète à la fois les écarts de salaires entre les femmes et les hommes, l’effet du temps partiel et celui des carrières moins souvent complètes chez les femmes. À la retraite, les femmes paient cher ces inégalités dans le monde du travail.
On pourrait distinguer deux formes de pauvreté : d’un côté, la pauvreté des niveaux de vie réels, ce avec quoi un ménage vit concrètement et qui détermine ses conditions de vie ; de l’autre, la pauvreté des ressources individuelles, en prenant alors en compte les revenus propres de la personne : non pas ce avec quoi vivent vraiment les personnes mais ce qui leur revient individuellement. Cette deuxième mesure représente ce qui reste aux individus quand le couple se sépare, avant prestations sociales, et donne un indicateur de l’autonomie économique des personnes, et notamment des femmes.
Photo / © Angèle Schmidt
[1] Voir « Niveau de vie et pauvreté des femmes et des hommes », in Les revenus et le patrimoine des ménages, édition 2018, coll. Insee Références, Insee, juin 2018.
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