Analyse

Le nombre d’actes racistes augmente en France depuis 2017

Le nombre d’actes racistes enregistrés par la police et la gendarmerie augmente, de même que celui des condamnations par la justice. Un phénomène inquiétant, mais qui peut aussi être le résultat d’une plus grande attention portée à ces faits par les forces de l’ordre. Une analyse extraite du Centre d’observation de la société.

Publié le 20 août 2025

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Modes de vie Origines Lien social, vie politique et justice

Les actes racistes enregistrés par la police et la gendarmerie augmentent très nettement en France, selon le ministère de l’Intérieur. Ils sont passés de 9 000 à plus de 16 000 entre 2017 et 2024. Les cas les plus graves, les crimes et délits, ont même plus que doublé, passant de 4 800 à 9 350, au cours de la même période [1]. Les données du ministère de la Justice sur les condamnations liées à ces actes indiquent une diminution à partir du milieu des années 2000, suivie d’une relative stabilisation autour de 450 par an jusqu’à la fin des années 2010. Depuis 2018 (nouvelle série), les condamnations ont plus que doublé, d’un peu plus de 600 par an à 1 249 en 2022.

Lecture : en 2024, 9 350 crimes et délits à caractère raciste ont été enregistrés par la police et la gendarmerie.

Source : ministère de l’Intérieur – © Observatoire des inégalités

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Lecture : 1 249 infractions ont été condamnées en tant qu'actes à caractère raciste en 2022.

Source : ministère de la Justice, CNCDH – © Observatoire des inégalités

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Ces chiffres doivent être considérés avec précaution. Le ministère de l’Intérieur précise qu’il s’agit d’actes commis « en raison de l’ethnie, de la nation, d’une prétendue race ou de la religion ». Il ne s’agit donc pas uniquement de racisme, mais plus largement de xénophobie, de rejet des étrangers. Classifier un acte comme fait raciste comporte une part de subjectivité de la part de celui qui l’enregistre. Le recensement des actes évolue en fonction de l’activité des forces de sécurité. Selon la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), « les agents de terrain (police, gendarmerie) sont de mieux en mieux formés et de plus en plus attentifs à la qualification de racisme des faits qu’ils enregistrent, ce qui peut être aussi un facteur d’augmentation des relevés » [2]. Enfin, le chiffrage dépend aussi de la volonté et de la capacité des personnes à déclarer ou non les actes qu’elles ont subis.

Les cas de racisme recensés par les forces de l’ordre, et plus encore ceux des condamnations, ne révèlent qu’une très faible partie du phénomène. Le racisme au quotidien est rarement enregistré. Pour essayer de mieux évaluer le phénomène, le ministère de l’Intérieur réalise tous les ans une enquête au cours de laquelle il interroge la population pour savoir si elle a été victime de racisme. Plus d’un million d’adultes disent avoir été concernés en 2022, soit 2,4 % de la population. Parmi eux, moins de 3 % font une démarche auprès des forces de l’ordre. La plupart des actes sont des injures, dont il est difficile de faire la preuve.

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Le nombre de personnes qui se disent victimes d’injures à caractère raciste a augmenté de 560 000 à 740 000 par an entre 2008 et 2013, puis il a nettement diminué pour revenir à 530 000 en 2018. Mesuré uniquement depuis 2011, le nombre de celles qui se déclarent victimes de violences physiques à caractère raciste a été divisé par deux, d’un pic de 236 000 en 2012 à 114 000 en 2018. Malheureusement, les données récentes ne permettent pas de dresser une évolution. On sait seulement qu’entre 2022 et 2023 la part de la population adulte se déclarant victime de racisme est passée de 1,6 % à 2,6 %, soit environ de 670 000 à 1,3 million de personnes. Ces données doivent être confirmées, mais elles vont dans le sens des actes enregistrés par la police et la gendarmerie.

Personnes de 14 ans ou plus.
Lecture : en 2018, 531 000 personnes de 14 ans ou plus ont été victimes d'injures racistes et 114 000 de violences physiques à caractère raciste, selon l'enquête de victimation du ministère de l'Intérieur.

Source : ministère de l’Intérieur – © Observatoire des inégalités

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Comment expliquer la hausse des actes racistes, alors que la population dit l’être de moins en moins ? Quand une société est plus attentive à un phénomène social, elle fait ressortir des actes qui hier étaient passés sous silence. L’évolution actuelle résulte en partie d’une plus grande attention à ces faits par les forces de l’ordre ou d’une déclaration plus fréquente (ou plutôt « moins rare ») de la part des victimes. Ces actes seraient donc mieux enregistrés. Enfin, on l’a vu, le champ couvert est plus large que le racisme au sens strict.

Ces raisons ne semblent pas pouvoir expliquer l’ensemble de la progression, tant elle est importante. Au cours des trois dernières années, les tensions au Proche-Orient ont joué, indique le ministère de l’Intérieur. L’essor des réseaux sociaux pousse à la prolifération des injures à l’abri des écrans. Une partie des responsables politiques tiennent désormais des discours ouvertement xénophobes qui légitiment le passage à l’acte d’une minorité, parmi les 20 % de Français qui se disent « plutôt » ou « un peu » racistes. Ce qui constitue un profond recul par rapport aux valeurs promues par notre société.

Photo / © Freepik

Extrait de « Les actes à caractère raciste progressent fortement en France depuis 2017 », Centre d’observation de la société, 13 juin 2025.


[1Voir « Les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux en 2024 », Info rapide n°49, ministère de l’Intérieur, mars 2025.

[2La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, année 2022, Commission nationale consultative des droits de l’homme, Documentation française, 2023.

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Date de première rédaction le 14 septembre 2023.
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