Données

1980-2020 : les « Quarante Glorieuses » des très riches

Comment ont évolué les revenus des très riches ? Le 1 % du sommet a connu un enrichissement plus rapide que le reste de la population depuis les années 1980. Après une hausse quasi continue, sa part dans l’ensemble des revenus atteint son plus haut niveau depuis 1945.

Publié le 8 juillet 2024

https://www.inegalites.fr/evolution-revenus-riches - Reproduction interdite

Revenus Riches

En France, les 10 % les plus riches reçoivent plus d’un tiers du total des revenus avant impôts selon les évaluations du World Inequality Database (WID) [1] pour l’année 2022. Le niveau est le même qu’en 1945. De la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’en 1960, la part reçue par les 10 % les plus riches passe de 31 % à 38 %. La très forte croissance des revenus à cette période a donc d’abord profité aux plus aisés. Ensuite, on a assisté à un retournement de tendance : jusqu’à la fin des années 1970, la part des revenus perçue par les 10 % les plus riches a régulièrement diminué pour passer de 38 % à 30 % du revenu national. Cette tendance a bénéficié aux classes moyennes et populaires. On explique cette tendance à la fois par le faible niveau du chômage et par la forte implantation syndicale. Cela a conduit à cette époque à de fortes hausses des salaires : en mai 1968, les accords de Grenelle ont par exemple eu pour conséquence une hausse de 35 % du salaire minimum.

Revenus avant impôts.
Lecture : en 2022, le 1 % le plus riche perçoit 12,7 % de l’ensemble des revenus.

Source : World Inequality Database – © Observatoire des inégalités

Graphique Données

Au début des années 1980 démarre une nouvelle période : la part du revenu global en faveur des plus riches repart à la hausse, de 30 % en 1979 à 33 % en 1989. Elle s’est maintenue à ce niveau pendant quinze ans. La crise de 2008 a affecté les revenus financiers des plus riches. Depuis, leur part dans le revenu global évolue en dents de scie, sous l’effet notamment de l’instabilité des marchés financiers. Selon les estimations du WID, l’indicateur atteint 35 % en 2021 et 2022, les deux dernières années disponibles : les plus riches ont retrouvé le même niveau qu’à la sortie de la Seconde Guerre mondiale.

La progression du 1 % le plus riche

Tout se joue au sommet de l’échelle des revenus. L’enrichissement du 1 % le plus riche, quasi continu depuis le milieu des années 1980, explique la majeure partie de l’évolution sur longue période de la part perçue dans le revenu national par les 10 % du haut. La part du 1 % le plus riche représentait 7,7 % de l’ensemble du revenu national en 1982 et atteignait 11,7 % en 2008. Après la crise financière, les revenus du 1 % du sommet retombent aux alentours de 10 % en 2012. Mais, depuis, la progression des dividendes versés aux actionnaires a fait repartir cette part à la hausse. À 12,7 % de l’ensemble des revenus en 2022, selon les estimations du WID, la part du 1 % le plus riche atteint un niveau jamais égalé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Ces données reflètent la répartition de la richesse en France. Elles posent toutefois deux problèmes : d’une part, elles ne tiennent pas compte de la présence ou non d’enfants à charge au sein des ménages. Par ailleurs, l’impôt sur le revenu n’est pas déduit : après impôts, la part des riches est moindre. On ne sait malheureusement pas dire réellement quelle est l’évolution de la part du niveau de vie (le revenu disponible après impôts par personne) perçue par les plus riches sur une aussi longue période de 40 ans. L’Insee, en effet, ne publie de données que depuis 1996 pour les 10 % des revenus supérieurs et ne diffuse pas de série longue pour la part du 1 % le plus riche.

Photo/ © Stock Birken / Unsplash


[1Les données mentionnées dans cet article se réfèrent aux estimations de revenus du World Inequality Database. Les revenus des individus sont établis en divisant le revenu du ménage par le nombre d’adultes de plus de vingt ans, sans tenir compte des enfants à charge.

L’Observatoire des inégalités a besoin de vous

L’Observatoire des inégalités est indépendant, il ne dépend pas d’une institution publique. Il n’accepte ni la publicité ni le financement de grandes entreprises.

Nous sommes financés principalement par les dons de milliers de personnes qui nous soutiennent ponctuellement ou régulièrement.

Avec votre soutien, nous continuerons de produire une information de qualité et à la diffuser en accès libre. Chaque contribution, grande ou petite, compte. C’est le moment de nous aider. Merci.


Faire un don
Date de première rédaction le 8 juillet 2024.
© Tous droits réservés - Observatoire des inégalités - (voir les modalités des droits de reproduction)

Sur ce thème