Les trois quarts des pauvres vivent hors des quartiers prioritaires
Moins d’un quart des personnes pauvres vivent dans un quartier dit « prioritaire » de la politique de la ville. Ces territoires, si souvent mis en avant, ne rassemblent qu’une toute petite partie de la population aux faibles revenus. Extrait du Centre d’observation de la société.
26 avril 2018
https://www.inegalites.fr/Les-trois-quarts-des-pauvres-vivent-hors-des-quartiers-prioritaires - Reproduction interditeMoins d’un quart des personnes pauvres vivent dans un quartier dit « prioritaire » de la politique de la ville [1]. C’est logique puisque ces territoires, si souvent mis en avant, ne rassemblent qu’une toute petite partie de la population : 4,8 millions sur 63,7 millions, soit 7,5 %. Dans ces quartiers, la part de personnes pauvres est très élevée : 42 % en moyenne, plus de trois fois la moyenne nationale. Certains quartiers prioritaires connaissent des situations bien pires, avec des taux de 60 %, voire 70 %. Au total, deux millions de personnes pauvres vivent dans ces quartiers, moins du quart de l’ensemble (23 %) des plus modestes, si on utilise le seuil à 60 % du niveau de vie médian. Pas moins de 6,8 millions de pauvres (77 %) vivent hors de ces territoires.
Où vivent les plus pauvres ? | |||
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Quartiers prioritaires | Reste de la France | Ensemble | |
Population (millions) | 5,4 | 61,5 | 66,9 |
Taux de pauvreté (%) | 43,6 | 12,0 | 14,6 |
Nombre de pauvres (millions) | 2,4 | 7,4 | 9,8 |
Répartition de la population pauvre (%) | 25 | 75 | 100 |
Source : calculs de l'Observatoire des inégalités d'après l'Insee – Données recensement 2018 et taux de pauvreté 2019 – © Observatoire des inégalités
Il y a quelques années, la mode était à la pauvreté « périphérique », hébergée soi-disant par la France périurbaine, des petites villes et du milieu rural. L’Insee a mis fin à ces spéculations en publiant le nombre de personnes pauvres par territoire. Encore ne faudrait-il pas tomber dans l’excès inverse : pour beaucoup, la pauvreté se concentre dans les quartiers dits « prioritaires », situés en banlieue des grandes villes, victimes d’un « apartheid urbain ». Une façon de réduire les politiques de lutte contre la pauvreté à des politiques territoriales sur un périmètre limité... et avec des budgets limités. Le raisonnement est identique pour les difficultés scolaires et la baisse de la taille des classes. Ce faisant, on oublie alors l’immense majorité des pauvres (ou des élèves en difficulté) qu’ils vivent en ville, dans le périurbain ou en milieu rural.
À l’heure de la mode du « big data » [2] et du « fact-checking » [3], notre pays a du mal avec les données de base qui pourtant ont du sens dans le débat public. Si l’on veut mettre en place des politiques qui répondent aux besoins, il y a urgence à mieux comprendre le territoire et faire la part des choses. Surtout, les réponses à apporter dans ce domaine aux jeunes, aux familles (monoparentales en particulier) ou aux personnes âgées diffèrent bien davantage par leurs caractéristiques démographiques que par leur lieu de vie.
Extrait du Centre d’observation de la société.
Photo / Zlatko Vickovic CC BY-NC-ND
[1] Politique destinée à compenser les difficultés sociales rencontrées par la population d’un ensemble de quartiers où les niveaux de vie sont les plus faibles de France
[2] Traitement de données massives sur nos comportements.
[3] Vérification rapide de l’information, souvent en mettant en avant des données.
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