La pauvreté est une question de revenus, mais aussi de conditions de vie. Être pauvre, c’est également être victime de privations très concrètes. Selon l’Insee, 12 % des Français sont dans ce cas.
11,7 % des ménages sont pauvres en conditions de vie en 2019, selon l’Insee [1]. C’est-à-dire qu’ils ne parviennent pas à réaliser une partie des dépenses considérées comme nécessaires ou « normales » par l’institut (voir encadré ci-dessous), telles que payer son loyer sans retard, partir en vacances une semaine par an, disposer d’un logement doté du confort sanitaire de base et bien chauffé. La pauvreté en conditions de vie, indicateur indépendant du niveau de vie monétaire, apporte une mesure concrète des privations matérielles qu’engendre le manque de ressources.
Taux de privations matérielles Unité : % | |
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Taux de privation | |
Insuffisance de ressources | 13,9 |
Retards de paiement (impossibilité de payer à temps à plusieurs reprises) | 8,0 |
le loyer et les charges | 3,5 |
Restrictions de consommation (les moyens financiers ne permettent pas de) | 11,0 |
maintenir le logement à bonne température | 5,7 |
payer une semaine de vacances une fois par an | 23,7 |
acheter des vêtements neufs | 12,4 |
offrir des cadeaux | 8,3 |
prendre au moins un repas par jour sur les deux dernières semaines | 3,4 |
Difficultés de logement | 5,7 |
Absence de toilettes à l’intérieur du logement | 0,8 |
Absence d'eau chaude | 0,6 |
Absence de système de chauffage central ou électrique | 4,4 |
Logement trop petit | 6,8 |
Logement difficile à chauffer | 20,6 |
Logement bruyant | 16,8 |
Ensemble | 11,0 |
Le taux de pauvreté en conditions de vie |
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En France, la pauvreté en conditions de vie mesure la proportion de ménages qui déclarent connaître au moins huit restrictions parmi les 27 répertoriées conventionnellement par l’Insee. Ces restrictions sont regroupées en quatre domaines : consommation, insuffisance de ressources, retards de paiement et difficultés de logement. |
Au cours de la période 2004-2019 [2], le taux de pauvreté en conditions de vie a régressé, passant de 14,6 % à 11,7 %, soit une baisse de 2,9 points. Trois catégories de dépenses semblent mieux couvertes aujourd’hui par les ménages. Tout d’abord, la part de la population qui rencontre des difficultés pour régler ses dépenses sans retard de paiement est passée de 11,5 % à 7,5 % sur la période. La part des retards de loyers a ainsi diminué de 5,3 % à 3,5 % en 2017 [3]. Ensuite, les difficultés graves de logement concernaient 10,1 % des ménages en 2004, un taux qui n’atteint plus que 6,1 % en 2019. Les conditions de logement se sont améliorées : 9,9 % estimaient vivre dans un logement trop petit par rapport au nombre de personnes dans le ménage en 2004, critère cité par 6,8 % des ménages en 2017. Enfin, les restrictions de consommation faute d’argent sont également moins souvent signalées : 12,4 % en 2019 contre 14,2 % en 2004. Les départs en vacances constituent toujours la variable d’ajustement la plus fréquente pour les budgets modestes : près d’un quart des ménages interrogés déclarent avoir de trop faibles revenus pour se payer une semaine de vacances une fois par an, contre un tiers en 2004.
L’insuffisance de ressources, en revanche, n’a pas significativement reculé. Elle concerne 13,3 % de la population en 2019, à peine moins qu’en 2004 (14 %). Ces ménages déclarent avoir du mal à éviter des dettes ou des découverts bancaires fréquents par exemple, ou bien ne pas réussir à mettre de l’argent de côté.
Comment expliquer l’amélioration des conditions de vie perçues par la population alors que la pauvreté monétaire a augmenté sur cette période de quinze ans ? Les difficultés matérielles ont été amorties en partie par notre système social. D’autre part, il s’agit de déclarations : en période de forte crise, il est logique d’ajuster ses réponses et de s’estimer, finalement, « pas si mal lotis » quand on sait que le sort des plus précaires se détériore, même si l’on vit un peu moins bien. On ne disposera pas des données 2020 avant plusieurs mois, mais il est difficile de savoir si la dégradation de la situation sociale liée à la crise sanitaire se traduira massivement dans ces indicateurs. Au fond, l’intérêt de ces données est peut-être moins de mesurer l’évolution des privations que de dresser un état des lieux des conséquences très concrètes de la pauvreté sur la qualité de vie et les préoccupations quotidiennes, tout au moins selon le ressenti subjectif de la population.
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[1] Donnée provisoire pour 2019. Le détail des privations déclarées (voir tableau) ne sont actuellement disponibles que pour l’année 2017.
[2] Les données 2019 sont provisoires.
[3] Dernière année disponible pour le détail des restrictions déclarées.