Minima sociaux, aide alimentaire, mal-logement : la misère persiste en France
Deux millions de personnes touchent moins de 750 euros par mois. 300 000 vivent en hébergement d’urgence. La France est l’un des pays les plus riches au monde, mais elle n’a pas éradiqué la misère.
14 décembre 2022
https://www.inegalites.fr/Minima-sociaux-aide-alimentaire-mal-logement-la-misere-persiste-en-France - Reproduction interditePlusieurs centaines de milliers de personnes ne connaissent pas seulement des difficultés de fin de mois, mais un manque d’argent permanent. Elles vivent avec 500 ou 600 euros par mois, parfois bien moins, et doivent se contenter du strict minimum. Pour tenter d’évaluer le phénomène, on dispose de plusieurs types de mesures [1].
Tout d’abord, en France, 2,1 millions de personnes – soit 3,2 % de la population – vivent avec au mieux 752 euros par mois pour une personne seule, soit 40 % du niveau de vie médian, selon les données 2020 de l’Insee. Malheureusement, on ne sait pas combien de personnes hors des filets de sécurité des prestations sociales vivent avec 300 ou 400 euros par mois par exemple (sous le niveau du RSA). Par ailleurs, l’Insee estime que deux millions de personnes sont en situation de grande pauvreté. Il s’agit de personnes dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté à 50 % et qui, en même temps, déclarent un grand nombre de privations matérielles.
Un peu plus de quatre millions de ménages doivent se contenter de minima sociaux pour vivre, soit sept millions de personnes si l’on inclut les conjoints et les enfants, selon le ministère des Solidarités (données 2020). Pour manger, entre deux et quatre millions de personnes ont eu recours à l’aide alimentaire distribuée par des associations en 2021, selon l’Insee. On sait également que 6,2 % de la population déclarent en 2021 ne pas pouvoir, pour des raisons financières, manger de la viande ou du poisson tous les deux jours.
La Fondation Abbé Pierre évalue à 2,4 millions le nombre de personnes qui vivent dans un habitat dégradé. Parmi elles, deux millions résident dans des logements très inconfortables et 100 000 dans des habitats de fortune (cabane, camping, etc.). La Fondation dénombre par ailleurs 285 000 personnes qui vivent ou dorment dans des centres d’hébergement. En y ajoutant 16 000 personnes qui habitent des bidonvilles et 27 000 personnes sans abri (recensées en 2016), elle estime à environ 300 000 personnes le nombre de sans domicile [2].
Notre pays protège mieux que les autres de la grande pauvreté. La part des personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté à 40 % du revenu médian est presque deux fois supérieure en Italie et 1,4 fois en Allemagne, selon Eurostat (données 2020). Il n’en demeure pas moins que des dizaines de milliers de personnes vivent dans des conditions indignes. Ces situations sont vécues d’autant plus violemment que cette misère persiste au cœur d’une société où les niveaux de vie sont très élevés, où les conditions de logement se sont améliorées au cours des dernières décennies, et où l’accès à la consommation s’est largement diffusé.
La grande pauvreté en France | |
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Nombre | |
Personnes vivant sous le seuil de pauvreté à 40 % du revenu médian (Insee – 2020) | 2 063 000 |
Allocataires de minima sociaux (Drees – Fin 2020) | 7 100 000 |
- dont RSA | 4 090 000 |
Personnes vivant en habitat dégradé (Fondation Abbé Pierre - 2022) | 2 400 000 |
- dont logements inconfortables | 2 090 000 |
- dont habitats de fortune (cabane, camping, etc.) | 100 000 |
Personnes vivant dans un logement très surpeuplé (1) | 934 000 |
Personnes sans domicile personnel | 999 000 |
- dont personnes hébergées chez des tiers dans des conditions de logement très difficiles | 643 000 |
- dont personnes sans domicile (2) | 300 000 |
Personnes ayant reçu une aide alimentaire (Insee - 2021) | Entre 2 et 4 millions |
Source : Insee, Fondation Abbé Pierre, ministère des Solidarités - © Observatoire des inégalités
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[1] Les données de cet article sont issues de différentes sources et ne peuvent pas être additionnées car elles mesurent des situations qui se recoupent pour partie.
[2] Il n’est pas possible d’additionner les 100 000 personnes qui vivent dans un habitat de fortune et les 300 000 sans domicile car certaines peuvent être comptées dans ces deux catégories.
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