Point de vue

La belle égalité chez Axa

750 000 euros consacrés à la réduction des écarts de salaires hommes-femmes, c’est louable, mais c’est bien modeste pour l’obtention d’un « label égalité hommes-femmes ». Le point de vue de Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.

Publié le 12 octobre 2006

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Femmes et hommes

L’entreprise AXA a reçu le 10 octobre le « label égalité hommes-femmes » décerné par la ministre délégué à la parité, Catherine Vautrin. En particulier pour son engagement, via l’attribution de 750 000 euros sur trois ans à la réduction des écarts de salaires dans ce domaine. La majeure partie des entreprises ne font pas grand chose en la matière, et en moyenne en France, temps partiel inclus, les hommes touchent 40 % de plus que les femmes. Une bonne note donc pour l’entreprise qui est plutôt un bon employeur, et qui au moins semble s’interroger sur la question des inégalités contrairement à d’autres. Le label a été salué comme il se doit par la presse.

Une presse qui a oublié d’y regarder de plus près. Axa devrait débourser 250 000 euros par an (750 000 divisés par 3), soit 0,001 % de son chiffre d’affaires en France. Ce très faible investissement pour une entreprise parmi les plus riches au monde a de bonnes chances d’être vite rentabilisé, compte tenu de sa couverture médiatique et de son utilisation par la suite dans les documents de l’entreprise.

En 2005, dernière année connue, les 14 membres du directoire du groupe mondial ont touché 26 millions d’euros. Henry de Castries, le président du directoire, 2,5 millions à lui seul*, soit 10 fois le montant dédié à l’égalité hommes-femmes. Les 250 000 euros sont à se partager entre près de 5 500 salariées en France, soit 44 euros par femme. Au niveau mondial, AXA comptait fin 2005 une seule femme parmi les 29 membres du directoire, du conseil de surveillance et du comité exécutif. Aucune ne dirigeait une filiale opérationnelle. De quoi se voir décerner un label.

Ces labels, comme le discours autour de la « diversité », disposent d’une très grande audience (ils sont aussi diffusés avec de grands moyens). Ils sont difficilement critiquables en tant que tels : réduire les inégalités entre hommes et femmes, entre blancs et personnes de couleur ou entre invalides et bien portants, est une bonne chose tant la France est très en retard dans ces domaines. Mais ils permettent, en même temps, de masquer des écarts de revenus considérables (des centaines d’années de Smic parfois entre le haut et le bas de la hiérarchie), le développement de la précarité des contrats de travail, qui frappe au premier chef les populations que l’on dit vouloir favoriser... Ces bonnes actions à très faible coût constituent des opérations de communication qui occultent l’essentiel des inégalités au sein des entreprises.

* Il disposait aussi d’un stock cumulé de 5,6 millions d’euros de stock options.

Photo / © pedrosala - Fotolia.com

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Date de première rédaction le 12 octobre 2006.
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