Analyse

Combien gagnent les élus ?

Les revenus des élus font souvent l’objet de critiques. Les élus nationaux et les ministres sont très bien payés, mais leur situation instable. Les élus locaux sont quant à eux moins favorisés, ce qui incite au cumul des mandats. Par Noam Leandri, de l’Observatoire des inégalités.

Publié le 12 décembre 2013

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Revenus Modes de vie Salaires Lien social, vie politique et justice

Les ministres perçoivent depuis mai 2012 un revenu 1,4 fois supérieur au traitement de base moyen (hors primes) des hauts fonctionnaires, soit 7 720,55 euros bruts par mois (contre 14 076 euros en 2009), majoré d’une indemnité de résidence de 3 % et d’une indemnité de fonction de 25 %, soit un total de 9 940,20 euros bruts par mois en 2013. Le traitement du premier ministre est calculé à partir du plus haut traitement que peut percevoir un fonctionnaire, majoré de 5 % pour atteindre 14 910 euros par mois.

Le salaire des ministres a connu une augmentation de 70 % en 2002, lors de la disparition des fonds secrets mis à leur disposition pour toutes les dépenses qu’ils jugeaient utiles. L’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, s’était, quant à lui, adjugé une augmentation de 170 % en 2008 afin de gagner un peu plus que le premier ministre. L’une des premières décisions prises en mai 2012 par François Hollande en tant que chef de l’État a été de réduire de 30 % le traitement brut mensuel des membres du gouvernement et du président de la République. Alors que le traitement mensuel brut du président de la République représentait 17 mois de Smic en 2009, il équivaut aujourd’hui à 10 mois. De même, le traitement des ministres représente désormais 7 mois de Smic au lieu de 11 en 2009. Les avantages en nature tels que les appartements et les voitures de fonction ne sont pas comptabilisés.

Combien gagnent le président de la République et les ministres ?
Unité : euros
Traitement mensuel brut
En mois de SMIC *
Président de la République14 91010
Premier ministre14 91010
Ministre9 9407
Secrétaire d'Etat9 4437
* pour un smic mensuel brut de 1 430 euros en 2013.
Source : décrets n° 2012-766 du 17 mai 2012 et n° 2012-983 du 23 août 2012 - 2012

Les parlementaires - députés ou sénateurs - perçoivent une indemnité principale de 7 100 euros bruts par mois (5 149 euros nets) pour compenser la perte de leur revenu professionnel... bien qu’ils aient la possibilité de continuer à exercer, en particulier les professions libérales (avocats, médecins). En plus de cela, ils reçoivent deux indemnités forfaitaires et conséquentes pour couvrir leurs frais liés à leurs déplacements vers leur circonscription électorale, aux vêtements, aux restaurants, à un local dans leur circonscription et à la rémunération de leurs collaborateurs (secrétaire, attaché parlementaire).

Parmi les avantages en nature non comptabilisés ici, il y a des billets de train et d’avion gratuits.

Combien gagnent les députés et les sénateurs ?
Montants bruts par mois
Unité : euros
Député
Sénateur
Indemnité parlementaire7 1007 100
Indemnité représentative de frais de mandat5 7706 037
Crédits pour la rémunération de collaborateurs9 5047 548
Indemnité des présidentsnd*14 157
*nd : non disponible
Source : Assemblée nationale - Sénat - 2013

Enfin, les élus locaux sont indemnisés en fonction de la taille de leur collectivité. Les conseillers municipaux de Paris ont aussi la casquette de conseiller général et cumulent donc deux indemnités. Ce qui est souvent le cas des élus locaux. Le cumul de mandats est toutefois limité à deux, les présidents ou maires ne peuvent diriger une autre collectivité et le total des indemnités perçues ne peut dépasser 8 165 euros, sauf pour les indemnités des établissements inter-collectivités (syndicats de communes, communautés d’agglomération, etc.), sans compter les indemnités de frais de représentation qui peuvent atteindre 2 054 euros par mois pour le maire de Paris.

Combien gagnent les élus locaux ?
Montants bruts par mois
Unité : euros
Montant mensuel brut
Maire de Paris8 684
Maire d'arrondissement parisien5 512
Conseiller de Paris4 186
Maire d'une commune de plus de 100 000 habitants5 512
Adjoint au maire d'une commune de plus de 200 000 habitants2 756
Maire d'une commune de 10 000 à 19 999 habitants2 470
Adjoint au maire d'une commune de 10 000 à 19 999 habitants1 045
Maire d'une commune de 1 000 à 3 499 habitants1 634
Maire d'une commune de 500 habitants646
Conseiller municipal228
Président de conseil régional ou général5 512
Conseiller régional (+ 3 millions d'habitants)2 661
Conseiller régional (moins de 1 million d'habitants)1 520
Conseiller général (+ de 1,25 million d'habitants)2 661
Conseiller général (moins de 250 000 habitants)1 520

Source : Ministère de l'intérieur - circulaire du 19 juillet 2010, Opendata Paris (2013) - 2010

Commentaire

Les indemnités des élus et en particulier des ministres sont avantageuses. Leurs responsabilités sont élevées et leur situation instable. L’argent ne fait pas tout, mais pour recruter des citoyens qualifiés à ces postes, il faut leur proposer un certain niveau de vie [1]. Les revenus que nous présentons, y compris les divers avantages, sont très nettement inférieurs à ceux que peuvent toucher les cadres dirigeants du secteur privé pour des responsabilités parfois bien moindres. Une partie des critiques faites « aux politiques » dans ce domaine constitue une forme de mise en cause de la démocratie elle-même.

Ceci dit, face au risque de perte d’emploi, tous ne sont pas logés à la même enseigne. Les fonctionnaires sont assurés de retrouver leur emploi une fois leur mandat terminé. Les avocats, médecins et autres professions libérales peuvent continuer d’exercer ou sous-traiter leur activité. En outre, depuis 2009, les députés nommés ministres peuvent retrouver leur siège s’ils ne sont pas maintenus au gouvernement.

S’ils ne sont pas réélus ou maintenus, les députés bénéficient d’un régime d’indemnités de chômage bien meilleures qu’au Pôle emploi, et les ministres continuent de percevoir leur rémunération pendant six mois. Les élus locaux non reconduits reçoivent une indemnité de fin de mandat qui leur permet de conserver au plus 80 % de leur indemnité pendant un an.

Il n’est pas étonnant que les hommes politiques cumulent les mandats pour se prémunir du risque de perte de revenus. Toutefois, le cumul d’indemnités électives est plafonné à 8 272 euros brut par mois depuis le 1er juillet 2010, à comparer au salaire mensuel moyen des cadres du privé de 3 963 euros nets en 2010 [2], des cadres dirigeants du privé et des entreprises publiques (8 025 euros nets) [3] ou des cadres d’état-major administratifs, financiers, commerciaux des grandes entreprises de 11 524 euros bruts par mois en 2010 (voir notre article Professions : qui gagne combien ?). Évidemment, le système a ses failles. Le plafond n’intègre pas les indemnités pour frais, ni les indemnités spécifiques aux ministres, ni les indemnités des élus des établissements de coopération intercommunale (syndicats mixtes, communautés d’agglomération, etc.). Bref, toute la transparence mériterait d’être faite à ce sujet, au bénéfice d’ailleurs sans doute des élus eux-mêmes.

Photo / © david debray - Fotolia.com


[1Bien rémunérer des personnes en charge de décisions aussi importantes est, au passage, une façon de se prémunir des tentations de corruption...

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Date de première rédaction le 22 avril 2011.
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